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L’histoire de l’anglais : des tribus germaniques aux Beatles

  • davidpoingt
  • 29 oct.
  • 4 min de lecture

Quand on pense à l’anglais, on imagine la langue internationale par excellence — celle qui vous tire d’affaire en vacances, vous permet de discuter avec d’autres voyageurs dans un aéroport, une gare ou une auberge de jeunesse. C’est la langue des blockbusters, des séries à succès et de certaines des chansons les plus célèbres au monde. Pourtant, peu de gens sauraient retracer l’histoire de cette langue depuis ses versions les plus anciennes jusqu’à sa domination mondiale actuelle.

On dit souvent que, contrairement au reste de l’Europe, les pays d’Europe du Nord parlent parfaitement anglais, et que cela serait dû à de meilleures méthodes d’enseignement… tout en oubliant que les Suédois, Norvégiens, Néerlandais ou Allemands parlent des langues issues d’une même origine commune, celle-là même qui a aussi donné naissance à l’anglais.


Mais où et quand l’anglais est-il apparu ? On considère généralement que le vieil anglais (Old English) correspond à la langue du poème épique Beowulf, rédigé vers l’an 1000. Le poème s’ouvre sur ces vers :


Hwæt. We Gardena in geardagum,

þeodcyninga, þrym gefrunon,

hu ða æþelingas ellen fremedon.


Vraiment ? Ce charabia illisible serait de l’anglais ?! Et pourtant, il s’agit bien de la même langue que celle des chansons des Beatles. Simplement, entre-temps, elle a été façonnée et enrichie par de multiples influences linguistiques et culturelles au fil de ses quelque dix siècles d’existence.


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Extrait du manuscrit de Beowulf qui se trouve à la British Library de Londres

Aujourd’hui, l’anglais moderne (Modern English) contient de nombreux mots d’origine latine ou romane, comme le français ou l’espagnol. Des exemples ? Naive, costume, ballet, tortilla… Ces mots n’existaient pas dans la langue parlée en Grande-Bretagne avant l’invasion normande de 1066. Lorsque les Normands francophones ont conquis l’Angleterre, la nouvelle classe dirigeante a importé un grand nombre de mots latins et français sur le territoire.


Si vous avez quelques notions d’allemand, vous reconnaîtrez peut-être le sens de certains mots du poème Beowulf, car le vieil anglais appartient à la famille des langues germaniques. Avant l’arrivée des Normands, les îles britanniques parlaient des dialectes germaniques apportés par les Angles, les Saxons et les Jutes aux Ve et VIe siècles, regroupés sous le nom d’« anglo-saxon ». Puis vinrent les Vikings, entre les VIIIe et XIe siècles, avec leur vieux norrois (Old Norse).


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Carte de la migration des tribus germaniques vers les îles Britanniques


Comment s’y retrouver dans ce mélange venu des quatre coins de l’Europe ? La linguistique comparée peut nous aider en étudiant la grammaire, les régularités des changements de sons et certains mots du vocabulaire de base. Par exemple, après le VIe siècle, les mots allemands commençant par p ont systématiquement évolué vers un son pf, tandis que leurs équivalents en vieil anglais ont conservé le p inchangé. De même, les mots suédois avec un son sk ont développé un son sh en anglais.

Il existe encore quelques mots anglais avec sk, comme skirt et skull, mais ce sont des emprunts directs au vieux norrois, arrivés après le passage du sk au sh. En comparant cette fois l’anglais avec le latin, on observe aussi des correspondances régulières : l’anglais a t là où le latin a d, et f là où le latin a p au début des mots.


De la même manière que les langues romanes descendent du latin, l’anglais, le suédois, l’allemand et bien d’autres langues descendent d’un ancêtre commun : le proto-germanique, parlé vers 500 avant J.-C. Comme cette langue n’a jamais été écrite, les linguistes la reconstituent en comparant ses langues descendantes et en observant la régularité des évolutions sonores.


On peut remonter encore plus loin : le proto-germanique vient lui-même du proto-indo-européen, parlé il y a environ 6 000 ans sur la steppe pontique, dans l’actuelle Ukraine et Russie. C’est l’ancêtre reconstruit de la famille indo-européenne, qui regroupe presque toutes les langues d’Europe et une grande partie de celles d’Asie du Sud et de l’Ouest.


Parmi les plus lointains cousins de l’anglais, on trouve l’hindi, le persan et les langues celtiques, ces dernières ayant été remplacées par le vieil anglais dans ce qui est aujourd’hui la Grande-Bretagne, bien que certaines régions aient conservé le gaélique et ses variantes.


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Schéma représentant les différentes familles linguistiques et leurs évolutions jusqu'aux langues actuelles

Beaucoup de mystères demeurent : existe-t-il un lien entre l’indo-européen et d’autres grandes familles de langues ? Quelles langues étaient parlées en Europe avant son arrivée ? Nous l’ignorons encore. Ce que l’on peut supposer, en revanche, c’est qu’avec sa diffusion planétaire, l’anglais pourrait un jour se diversifier en nouvelles branches linguistiques, comme le proto-indo-européen l’a fait avant lui. D’ici quelques siècles, peut-être que les locuteurs de ces futurs « nouveaux anglais » ne se comprendront plus. Après tout, environ trois milliards de personnes dans le monde parlent de nos jours des langues natales très différentes, qui ne sont pourtant que les descendantes d’une même langue commune dont les mots ont été façonnés par 6 000 ans d’histoire.

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